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L’importance des échelles salariales

À une époque où les discussions sur l’égalité et la diversité sur le lieu de travail prennent de l’ampleur, se doter d’une structure salariale n’a jamais été aussi pertinent, voire nécessaire. Une approche globale de la rémunération non seulement est conforme aux normes éthiques, mais sert également de pierre angulaire pour cultiver un environnement organisationnel positif et inclusif.

 

On en discute avec le consultant en rémunération globale Pierre-Yves Legault.

E : Bonjour M. Legault et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions sur les échelles salariales. Tout d’abord, qu’est-ce qu’une échelle salariale exactement?

PYL : Ça correspond au salaire minimum et au salaire maximum – et tout ce qui se trouve entre les deux – qu’un organisme est prêt à payer pour un groupe d’emplois de valeur similaire.

E : En quoi est-ce utile? 

PYL : Pour commencer, les échelles salariales permettent de respecter la loi. Au Québec, il y a une loi sur l’équité salariale qui est déjà en vigueur, et, si la tendance se maintient, une éventuelle législation sur la transparence salariale pourrait être adoptée, comme c’est le cas en Colombie-Britannique. Les échelles salariales sont des outils utiles pour satisfaire ces exigences.

D’autre part, avoir des échelles salariales permet d’être objectif dans la détermination de la rémunération, de parler de rémunération et de faire preuve de transparence, et de satisfaire le personnel en respectant trois grands principes de la gestion salariale : l’équité interne, l’équité externe, et l’équité individuelle.

E : Comment? 

PYL : C’est que, pour mettre en place des échelles salariales qui couvrent tous les emplois au sein d’une organisation, il faut prendre le temps d’étudier lesdits emplois par rapport à leur valeur entre eux, à leur valeur sur le marché et aux caractéristiques individuelles des gens qui les occupent.

E : Parlons justement de mise en place d’échelles salariales. Comment s’y prend-on?

PYL : Voici les principales étapes pour l’élaboration d’échelles salariales :

    1. Déterminer à quel niveau l’organisation souhaite se positionner par rapport au marché pour ce qui est du salaire et de la rémunération globale;
    2. Décrire les emplois au sein de l’organisation et les comparer;
    3. Circonscrire le marché de référence pour l’organisation et recueillir des données de rémunération portant sur ce marché;
    4. Déterminer les critères sur lesquels se basera le positionnement individuel du personnel de l’organisation dans les échelles salariales.
  • À l’étape 1, l’organisation doit réfléchir à sa philosophie de rémunération, teintée notamment par ses valeurs et ses moyens. C’est le fondement de la prise de décisions ultérieures.
  • À l’étape 2, on doit lister chacun des emplois de l’organisation, en faire une description et les évaluer en tenant compte de plusieurs facteurs, dont les suivants :
    • Principales responsabilités du poste;
    • Compétences requises;
    • Expérience requise;
    • Niveau de scolarité requis;
    • Complexité des tâches;
    • Impact des décisions à prendre dans le cadre de l’emploi;
    • Efforts requis pour atteindre les objectifs de l’emploi;
    • Risque d’accidents de travail.

En gros, l’étape 2 permet de regrouper des emplois différents dans des catégories communes pour qu’on leur attribue équitablement la même échelle salariale.

  • À l’étape 3, l’organisation se demande qui représente sa concurrence sur le marché de l’emploi. La réponse à cette question est vraiment personnelle à chaque OBNL : certains se comparent à toutes les organisations de leur région, du secteur privé comme public. D’autres se comparent à des organisations dans le même domaine d’activités, mais dans toute la province par exemple. D’autres encore choisissent de regarder du côté de tous les OBNL, en mettant de côté les entreprises. Il y a plusieurs moyens de déterminer ce marché de référence et les salaires auxquels se comparer. L’organisation peut :
    • vérifier la provenance de son personnel;
    • vérifier la provenance des gens qui ont proposé leur candidature aux plus récents postes;
    • utiliser des données gratuites offertes par des firmes de recrutement, l’Institut de la statistique du Québec et des conventions collectives de compétiteurs ou d’organisations similaires;
    • acheter des enquêtes salariales produites par des firmes spécialisées.
  • Enfin, l’étape 4 repose sur un principe bien important à comprendre : équité salariale ne signifie pas égalité des salaires. En d’autres mots, il peut y avoir des écarts d’une ressource à l’autre pour un même emploi, et ce sont des facteurs individuels qui viennent les justifier. L’organisation doit donc prendre le temps de réfléchir aux critères qui, selon ses valeurs, justifient de tels écarts, comme :
    • le niveau de performance du personnel;
    • l’expérience de chaque employé.e;
    • les compétences acquises particulières ou spécialisées.

E : Ça vaut la peine pour les organisations de passer à travers ces étapes pour s’assurer d’échelles salariales bien construites?

PYL : Absolument! Les avantages sont nombreux pour les employeur.euse.s.

Il m’est arrivé de discuter avec des organisations qui ne voulaient pas mettre en place des échelles salariales, car elles disaient ne pas avoir les moyens d’augmenter leur masse salariale de toute façon. C’est pourquoi réviser l’ensemble de votre rémunération globale et des conditions de travail que vous offrez vous permet de déterminer ce que vous pouvez vous permettre de proposer et de vendre au personnel à recruter ou à retenir. Le salaire fait partie de la rémunération globale, donc une organisation qui, en se comparant à son marché de référence, constate qu’elle a moins à offrir en salaire peut faire l’effort d’offrir plus en vacances, en régime d’assurance, en flexibilité d’horaire, etc. Et les échelles salariales restent un moyen sûr pour offrir le meilleur salaire possible selon un processus équitable.

Un autre avantage des échelles salariales, c’est qu’elles viennent corriger les iniquités, qui peuvent s’être installées malgré les bonnes intentions. Et, même quand il n’y a pas d’iniquité, le personnel a le droit de se poser des questions et peut avoir des doutes sur l’équité salariale; une organisation qui s’est dotée d’échelles salariales est mieux outillée pour parler de rémunération en toute transparence avec son personnel et essuyer les doutes soulevés.

E : Ce qui doit aider à la rétention du personnel…

PYL : Voilà. Personne n’a envie de se sentir floué et tout le monde aime se sentir estimé à sa juste valeur.

E : Donc vous recommandez de divulguer les échelles salariales?

PYL : Cela dépend de chaque organisme. C’est toutefois de plus en plus courant d’indiquer la fourchette salariale pour un poste affiché, d’autant plus que les candidat.e.s sont de plus en plus à l’aise d’exprimer ouvertement leurs attentes en termes de rémunération. Pour ce qui est des employé.e.s déjà en poste, le fait de connaître l’échelle salariale pour leur poste leur permet d’envisager une progression; c’est une source de motivation.

E : Mais arrive-t-il que les échelles salariales briment la liberté d’action d’une organisation pour attirer ou retenir une ressource à qui l’on voudrait offrir plus que le seuil maximal de l’échelle pour son poste?

PYL : Les échelles salariales fixent les grandes balises pour déterminer la rémunération de façon équitable. Mais les employeur.euse.s conservent leur latitude pour négocier la rémunération en tenant compte des facteurs individuels de détermination des salaires.

E : Pour résumer, les échelles salariales, on serait fou de s’en passer!

PYL : C’est pas mal ça! Un dernier point cependant : il est important de faire évoluer les échelles salariales. Certes, il peut arriver qu’on décide de geler une échelle salariale pendant un an, pour différents facteurs. Mais, chose sûre, les échelles salariales sont à réévaluer annuellement, en collaboration avec le conseil d’administration, autrement elles seront vite dépassées, c’est-à-dire qu’elles ne s’arrimeront plus au marché.

  • Pour les faire évoluer, on tient compte :
    • de l’inflation;
    • des données annuelles du marché de référence;
    • de la capacité de payer de l’organisme.

Ainsi, les salaires resteront les plus compétitifs possibles, ce qui contribue au recrutement et à la rétention du personnel.
*** 

Merci à notre collaborateur :
Pierre-Yves Legault
, CRHA
Consultant en ressources humaines et en rémunération globale chez Gamma RH
pylegault@gamma.hr

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